12/03/2013
Théorie des viandes
plus tard
beaucoup plus tard
les critiques diront que ce que j'ai essayé de faire
c'était une littérature en vraie viande
une poésie qui se débite qui se faisande et se conditionne
et qui porte en elle-même sa date de péremption
ils évoqueront les nombreux scandales sanitaires qui souillèrent la réputation de l'industrie agroalimentaire en ces temps-là
et formuleront des hypothèses sur une star de la chanson
et la robe en viande crue qu'elle arbora à une remise des prix oubliée
et
bien sûr
ils auront raison
bien plus raison que moi et mes postillons quand j'essayais de vous la passer en force
mais
que feront-ils de toi
et de moi
parmi tous ces nerfs
15:57 Publié dans Bouts de peau | Tags : critique, viande, poésie, lady ga ga | Lien permanent | Commentaires (0)
07/03/2013
Auto da fé
personne ne le sut à l'époque
mais quand la bombe a explosé à la correspondance des métros A et D
ce qui fit partir le feu et le mua en magma brûlant
prêt à consommer
pour appel d'air boulimique
fut
outre quelques titres de presse gratuite distribuée à la station
une masse de papier grosse de plusieurs mètres cubes
constituée d'éditions brochées de
Marc Levy Guillaume Musso E.L. James Françoise Bourdin Jeanne Bourin Alexandre Jardin Anna Gavalda Philippe Grimbert Michael Connely Harlan Coben Jean d'Ormesson Erik Orsenna David Foenkinos Grégoire Delacourt Olivier Adam
Florian Zeller Amanda Sthers Sacha Sperling Bernard Werber Christian Jacq Milan Kundera
ce qu'on sut en revanche
c'est que le seul objet en papier qui fut retrouvé intact après l'incendie
était
un recueil de poésie
édité
à 200 exemplaires
en
1972
16:00 Publié dans Bouts de peau | Tags : attentat, musso, levy, kundera, poésie, métro | Lien permanent | Commentaires (0)
03/03/2013
Peinture
Et puis j'ai aussi eu ma phase peintre.
Peintre en poitrines et en jarrets uniquement, mais peintre très consciencieux.
Je me suis cherché longtemps. J'ai commencé à peindre au couteau.Et puis ça m'a lassé. Je me suis tourné alors vers la lance à incendie. Mais j'ai assez rapidement flairé la cucuterie inhérente à cette technique et j'ai aussi laissé tomber.
Je me suis alors tourné vers la peinture au lasso, au pic à glace, au divan, au mercure liquide et au pollen, sans jamais arriver à maîtriser totalement mon sujet.
J'ai même poussé la prétention jusqu'à peindre à la Kalachnikov vers la toute fin des années 90.
Quel manque de sens de l'histoire de l'art, n'est-ce pas ?
Cela faisait déjà vingt ans que plus personne ne peignait au napalm.
Voilà comment on apprend qu'à un certain âge on n'est génial qu'à force d'inculture.
Les éditeurs et directeurs de galeries qui ne se faisaient pas prier pour me l'expliquer ont ma plus profonde reconnaissance, maintenant. Mais à l'époque, je me vexais vite. J'avais tendance à les passer au broyeur automatique et à les éclater façon expressionnisme abstrait.
Et je retournais peindre au couteau.
Rien ne vaut les techniques traditionnelles - les plus héroïques parmi mes ancêtres n'avaient-ils pas fait fortune en peignant à la teub? - , mais arriva le jour où j'en a eu vraiment ma claque.
Trop salissant, la peinture.
Trop contraignant en termes de matériel et de décors.
Alors maintenant j'écris, voilà.
11:09 Publié dans Bouts de peau | Tags : peinture, napalm, kalachnikov, couteau, histoire de l'art | Lien permanent | Commentaires (0)