12/10/2017
LE DOUZE OCTOBRE EST LA DATE D'ANNIVERSAIRE DU TYPE QUI M'A APPRIS À FUMER DES JOINTS ET À JOUER DE LA GUITARE, ÇA ME SEMBLAIT ASSEZ IMPORTANT POUR VOUS EN FAIRE PART
gloire au gosse perturbé celui qui à douze ans nous apprit à
fumer
et à jouer Come as you are à la guitare
pour avaler il fallait
accomplir ce simulacre de suffocation
imagine qu'on te prend en flag — HHHHHHHH !... Y a papa !
pour pas vomir il fallait avoir les couilles
mais t'inquiète pas les couilles c'est le temps c'est l'habitude
cet été-là
fut aussi celui où on s'est battu à mort pour une histoire de Megadrive
gloire aux papas Front National maravant les mamans communistes
gloire et sang et poudre et pus
aux frigos vides qui dévident les caïds en devenir chez les fils de notables
pour y trouver ce qu'ils croient être de la stabilité
fumer
monter sur les toits
faire le mur et mettre un traversin sous le drap
autant de trucs à honorer les Spartiates et leurs rites de passage
— les rites c'était lui, les mots comme Spartiates, c'était moi —
mais quand je voulais bien arrêter de ramener ma science une demi-heure
on allait aux HLM
il m'introduisait à l'aristocratie
il y avait là tous les habitués du conseil de discipline
et même des filles — des vraies, des sans surpoids qui se foutaient d'être vétérinaires
j'en étais conscient
il lui fallait un gros à lunettes pour faire rebondir ses vannes
mais
des avortons bancroches dans mon genre il y en avait plein
mais c'est moi qu'il avait choisi
quelle qu'en ait pu être
la raison
02/09/2017
Poème champêtre
derrière chaque fenêtre en face de l'immeuble en construction
il y a un petit enfant fasciné
qui s'exclame intérieurement
vas-y Joao visse
vas-y Mouloud cloue
vas-y Vlatsimil emboîte
vas-y Mamadou rivette
vas-y Harish cimente
vas-y Horacio bétonne
vas-y Amir couvre
vas-y Mal tends
vas-y Jean-Claude surveille
vas-y Roger engueule
allez-y hommes dansez
allez-y hommes suez
construisez élevez bâtissez érigez
sous la pluie cramez
sous me cagnard éternuez
vous viendrez chialer
quand vous aurez des papiers
09:09 Publié dans Bouts de peau | Tags : gros oeuvre, comment se porte le bâtiment, travailleurs sans papiers | Lien permanent | Commentaires (0)
09/05/2017
Gratos XV
Les structures sociales de mon binôme sont à nu, à force d'encaisser les sables et les caillasses.
Et je mourrai ici.
C'est écrit en toutes lettres, dans son corps, dans sa démarche de cow-boy biker ayant connu l'époque où on emballait dans les balochess.
Dans la vibration fessière du camion, je me cogne à cette évidence et ne rends aucun son :
en tant que poète de la réalité, ma poésie est faite pour les binômes.
Les binômes ne lisent pas de poésie.
Et pourtant c'est pour eux, pour les faire advenir dans la réalité vraie et non poétique, que s'écrit la poésie des poètes de la réalité.
Pour les odeurs corporelles, les supermarchés, la campagne moche.
Et pour la journée qui avance. Pour en faire quelque chose de vivable. Ça fait plus d'un mois maintenant.
JE N'Y ARRIVE PAS.
JE SUIS BLOQUÉ.
C'EST LA FRIGIDITÉ CRÉATIVE DE LA JOURNÉE SANS ESPOIR.
*
Ce n'est pas l'âme du poète qui déteste à présent - c'est le corps du poète.
Une détestation qui est une détestation d'animal : la sueur – au stade intermédiaire de la sueur qui est la sueur entre la sueur des travailleurs et la sueur des vieux.
Quoi qu'il dise maintenant, les mots qui sortiront de sa bouche auront la même odeur.
Peu à peu, la cabine du camion est saturée.
Je ne suffoque pas. Je ne suis pas du genre à suffoquer pour si peu.
Je hume je déteste. Je ricane et je me tais. Puis j'enfouis mon appendice dans ma main ouverte. Ça sent le tabac. Je pense à la beauté.
…
Eux. Leurs couleurs. Leurs écailles. Et surtout, les jeux de lumière sur.
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Longtemps j'ai cru que la beauté se nichait seulement dans l'œil de l'homme qui regarde. Et j'ai maudit ces quantités et quantités de beauté perdue du fond des océans, des jungles, des replis des intestins, cette beauté inaccessible, perdue pour tout le monde.
Et puis j'ai compris. Binôme ou pas, on se la pète toujours à tort d'être homme. Pas un poissecaille tapi dans la barrière de corail un bout de surfer entre les lèvres qui ne comprenne pas cette chose, la beauté. Il s'agit de dimorphisme sexuel. Il en va de la reproduction sexuée.
En tant que poète de la réalité, je suis pour la reproduction sexuée.
...
Un cahot me réveille.
Maintenant c'est mon binôme qui agite ses mâchoires comme un poisson hors de l'eau. Je ricane à nouveau. Je n'ai pas mis le son mais je sais qu'il vient de me servir une de ses brillantes analyses politiques sur les chômeurs volontaires.
L'air de rien, comme si nous n'étions pas dans la même cage et que ce n'était pas un miracle qu'on ne se soit pas encore écharpés.
À cette minute, l'odeur est sans équivoque : notre guerre civile.
Mais on ne cause pas de binômes, dès lors.
On parle de hamsters.
06:20 Publié dans Bouts de peau, Gratos, Tourisme | Tags : binôme, beauté, reproduction sexuée | Lien permanent | Commentaires (0)