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06/04/2020

Sinon :

peste2.jpg

 

 

Lundi, balade.

Rien.

C'est

plutôt cool pour l'instant.

 

*

 

Tout ce que j'aurais à dire en attendant 

c'est qu'il y a 

à peu près autant de bagnoles qui circulent en ce moment

que dans mes rêves érotiques

les plus fougueux.

 

*

 

J'imagine les banques

dans un monde où tout le monde porte un masque :

le type fait irruption

CECI EST UN HOLD-UP !

il est visage nu

et menace le personnel

avec sa salive.

 

*

 

Sinon :

les églises quant à elles sont ouvertes

je ne sais vraiment pas quoi faire

de cette information.

 

 

03/04/2020

Des nouvelles du boulot (chute d'un truc en cours)

Le cendrier près de l’entrée de service a été supprimé. Remplacé par un autre, plus petit plus design, au milieu du parking.

 

Un cendrier qu’on déplace, les automatismes d’une centaine de corps pulvérisés. Tout un monde à réapprendre – la main, d’abord, frustrée, les yeux qui cherchent à y piger (nouveau-né), puis les jambes, retour en arrière, piteux, de quelques mètres, sous la pluie (ou la merde, c’est la saison) éventuellement.

 

Pulvérisée aussi la connivence, les cinq minutes de gagnées sur la journée, l’ultime aspiration fébrile du condamné (racler ce qu’on peut avant des heures).

 

L’ancien cendrier était une pièce de maçonnerie circulaire avec des petits cailloux blancs sur les côtés. Quatre-vingt centimètres de large. Un chaudron pour les soupes du diable, un brasero pour se réunir, un signe de tête au gardien dans sa loge, Marc ou Michel selon le mouvement des astres.

 

Il avait quelque chose de brut, barbare, non apprêté, et ça nous allait bien. L’entrée de service se doit d’être fonctionnelle, grisâtre et sans fioriture. On ne cherche pas à nous la faire à la séduction : nous sommes là pour bosser. Or le nouveau cendrier est un long tube noir et luisant, d’une belle matière luisante, une tache design et fuselée collée à un des piliers qui supportent le plafond du parking à vélos, et autour duquel il est impossible de se tenir à plusieurs.

 

Une invitation à jeter vite les choses moches et à filer au boulot, plus vite que ça. Avant d’être aperçu depuis le poste de garde. Comme si tout ça, ce sas – sortir de la rêverie du trajet, accepter par palier le contact avec d’autres êtres humains, se muer en travailleuravec une bonne dose de nicotine pour tenir la première heure – était devenu soudain honteux.

 

Qui sait combien de réunions de direction ont été nécessaires pour réaliser cet escamotage.

 

Combien d’entreprises ont été mises en concurrence de façon à respecter la législation sur les marchés publics.

 

06/11/2019

Jean-Claude requiem VI

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à Mimoune Fuzz

Jean-Claude a été inhumé le vendredi 18 octobre 2019 au cimetière de la Croix-Rousse mais il continue de se passer des choses bizarres autour de sa disparition.

 

Fait extraordinaire, le mercredi précédent, je sors mes sept épouses. Nos douze enfants sont gardés par une amie présentant un fort taux de tatouages, mais ça on le relève surtout pour l’anecdote. Ce qui est peut-être plus significatif c’est que nous nous rendons au concert-performance-rite de divination d’une très bretonne et très antique pythie répondant au nom de Brigitte Fontaine – là, nous nous imbibons légèrement, et assistons pendant une heure à une série deprodiges à base de petits cris aigus et de boucles de guitare électrique. Au summum de l’événement un guitariste rock ayant roulé sa bosse derrière Bashung Thiéfaine Miossec et Sylvie Vartan, tout en crinière olympienne et pantalon de cuir dionysiaque est tout à coup changé en enfant de cœur, en pénitent agenouillé devant un trône de velours rouge, en Annie Cordy. Et ceux qui y étaient vous le diront : au bout de la drôlerie, tout au bout du décalage la chose était belle, simplement.

 

Le fait que ce concert eût lieu à Caluire-et-Cuire, ville environnée de Mystères & rites initiatiques, n’est peut-être pas étranger au mysticisme du moment – ce sont des choses qu’on se dit après coup.

 

Toujours est-il que : après une heure et demie de transports en commun retour, Maeva – c’est le nom de la généreuse gardienne de nos douze enfants, qui l’ont adorée immédiatement – Maeva qui dans le civil exerce la profession de croque-mort, me lance entre deux portes :

 

- Tiens, cette semaine je me suis occupée d’un de tes collègues.

 

Je vous le donne en mille : Jean-Claude.  

 

Et de me donner la raison du long délai pendant lequel Jean-Claude a dû attendre sa dernière résidence :

Quand une personne meurt à domicile

Quand une personne meurt avant d’avoir le grand âge

Quand une personne ne meurt ni dans un hôpital ni dans un hôpital,

Où du personnel formé, organisé, hygiénique, épuisé, rigoureux

sait en général très bien de quoi une personne est morte puisque c’est elle qui l’a tuée,

quand une personne meurt comme ça entre un clignement de cils et une liste de courses à faire,

dans une grande maison avec sa mère malade et sans doute quelques corbeaux qui regardent par la fenêtre

on fait

une autopsie.

 

La médecine légale– dernière équipe à s’être préoccupée de Jean-Claude.