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04/11/2014

Pour une débénabarisation du quotidien 2

6) Ce n'est fait que de ça. De jours qui se suivent l'un après l'autre, qui s'emboîtent, qui se fatiguent, qui laissent le suivant faire mieux, qui toussent en lisant les nouvelles du jour. Moins vrais que ce qu'on nous promettait dans les livres d'histoires et le calendrier Maya.

 

7) Pourtant c'est comme ça que ça s'est fait pour Moïse, pour Alexandre le Grand, pour Saint Louis, pour Soliman, pour Mimar Sinan. Et pour mes ancêtres qui au milieu de tout ça avaient déjà honte de connaître que le patois.

 

8) Il y a eu cinquante mille ans de guerres, de commerces internationaux, de massacres spontanés, de modes artistiques, d'évolutions technologiques, de révolutions anthropologiques, de traités de paix et de trahison desdits, de campagnes de révisionnisme officiel, d'épopées dûment labellisées par les pouvoirs de toutes sortes, d'étouffement d'affaires gênantes et de déplacements de populations pour que j'en arrive à monter cette étagère Ikea, Mr B.

 

9) Et j'en suis toujours à prier l'esprit de ma fiche de paye pour lui regonfler si possible un orgueil à quatre chiffres avant la virgule, si vous voyez ce que je veux dire.

 

10) Ce n'est pas que j'aie grand-chose contre les mono- et polythéisme qui tiennent le haut du pavé occidental depuis quelques milliers d'années. Mais avouez qu'au temps de l'animisme, même ma fiche de paye mon arabica premier prix mon pyjama en soldes chez Emmaüs avaient droit à leur dose de dignité humaine.

 

11) Et pourquoi pas moi avec, pendant qu'on y était.

 

02/11/2014

Pour une débénabarisation du quotidien

Cher monde cruel,

 

Tu peux constater, si tu jette un coup d'œil sur ta droite, qu'une nouvelle catégorie vient d'apparaître sur ce blog. Elle s'intitule :

POUR UNE DÉBÉNABARISATION DU QUOTIDIEN.

Cela mérite quelques explications.

Il y a quelques jours, j'étais accoudé au comptoir d'un lieu qui s'appelle le Périscope, et qui est ce qu'on a trouvé de mieux pour écouter de la poésie. Je buvais une bière avec deux mecs de ma générations. Je te laisser cliquer dans les liens que tu vois sur ta droite, sous les catégories, et essayer de deviner de qui je parle. Et on agitait une question d'importance : comment intégrer la notion de mouche-bébé dans la poésie contemporaine ? Et sans faire du Bénabar ?

Pas par rejet de principe de l'individu qui se fait appeler Bénabar, note bien. Il y a quelques très bonnes chansons sur son premier album : je me souviens d'une en particulier, une histoire de taré amoureux d'une majorette dans un contexte de fanfare de village dans le Nord*. Mais pour l'essentiel, ce monsieur s'est fait connaître pour des textes dont la portée spirituelle revenait à dire que l'enjeu du XXIè siècle résidait dans le choix de la couleur d'une bibliothèque Billy. 

Or, quand Bénabar chante le monde Ikea, c'est comme quand Houellebecq réduit le sens de l'histoire contemporaine au tourisme en Asie du sud-est : c'est terriblement réducteur.

Certes, beaucoup d'entre nous sont concernés par l'ameublement suédois, et certes, des retraités bourrés aux as vont se faire tripoter les bourrelets à Bangkok.

Mais dans les labyrinthes géants que ces putains de grands blonds foutent dans leurs magasins comme derrière le sourire impassible des masseuses thaïes, il passe chaque jour des drames, des tragédies, des vaudevilles, des décisions irrévocables et des rêves.

Note bien que je ne prétends pas à l'originalité. Il y a toujours eu des artistes pour plonger dans un tas de factures et de chaussettes sales pour en sortir de l'or. Quand HFT chante que "ça sent la vieille guenille et l'épicier cafard dans ce chagrin des glandes qu'on appelle l'amour"**, ce n'est pas moi de quotidien qu'il s'agit que quand le précité Bénabar propose à sa moitié d'annuler un dîner pour se vautrer devant TF1. Mais ça me semble plus riche. En tout cas, moi, ça m'aide incomparablement plus à vivre.

Donc, je me lance. Je vais procéder sous formes de liste, par sous une forme brève que dans un recueil encore inédit j'ai appelé la connerie (et dont on reparlera dans quelques mois si tout se passe bien). 

Et ça ira où ça voudra aller.

À demain.

 

 

*Je ne crois pas que le Nord soit cité dans la chanson, mais si je voulais trouver des tarés ET des majorettes pour mon 11 novembre, c'est quand même là que j'irais.

**Je ne précise pas d'où sort cette citation, exprès. Cherche. Et si tu es obligé d'écouter tout Thiéfaine pour trouver, tu me remercieras.

 

 

15/04/2014

La sainteté commence par les pieds

Je ne peux pas le dire,

hein —

j'aurais mon père, ma mère,

avec des torches enflammées.

Non, je ne peux pas le dire —

j'aurais ma copine, mes copains, mon gosse

avec fourches affamées — Non,

il faut me taire

— j'aurais

mon frère ma soeur le maire et tous mes éditeurs

avec tanks et moissonneuses-batteuses.

Je ne peux pas le dire

que la plus belle chose qui me soit arrivée dans la vie

est ce tapis de bain

fabriqué en Suède

que tu as rapporté l'autre jour.

 

Et pourtant.

Sens, sens.

Sens comme la plante de tes pieds

efface toute pensée.

Gouttes.

Buée.

Rémission de tous les péchés du monde

l'espace qu'une seconde.