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14/06/2013

Tentative de description n°1850242 SPQR410 (économie)

(à Aurélie Filippetti)


il faudra bien qu'ils le comprennent un jour

ces vendeurs d'aspirateurs spirituels & préparos en crachats marketing

prêts à tout pour foutre notre sens des réalités sous verre

que la poésie

n'est rien d'autre qu'une forme d'économie gonzo

qui a anticipé il y a bien des siècles

chacune de leurs petites magouilles

chacune de leurs sueurs aigres sous le costard sur-mesure

chacun des ricanements tapis aux angles morts de leurs miroirs


il faudra bien qu'ils s'y fassent

nous connaissons leur chute

date heure conditions atmosphériques

ascendants conjonctures & passages de comètes


on était là avant eux

à danser autour de nos têtes de mammouths évidées

et on sera là après

même danse

sièges cuirs défoncés des limousines fossiles


pour l'instant

seul le silence est de notre côté

le silence et des conjurations des éditeurs indépendants

vivant dans des catacombes et prononçant de sombres incantations en portant au feu les pages culturelles de grands quotidiens nationaux

pour l'instant

on ouvre des antennes de cliniques privées pour rentabiliser nos dépressions

et tout le monde applique la circulaire

ne pas se foutre de notre gueule

quand on refait le match

dans la rue

à haute voix

en agitant les bras


mais bientôt 

il n'y aura plus assez de terrains constructibles

les cours des asiles

déborderont dans antennes régionales du ministère de la culture


et alors

on va bien rigoler


 

11/06/2013

Marins à terre

elle était pas très grosse

mais elle était gratuite

elle était pas très belle

mais elle était toute nue

elle était plus toute jeune non plus

mais on pouvait causer

elle était pas très forte

mais il y avait la quantité

 

d'où j'étais

ça avait l'air 

d'un étui à violon

 

après

plus sûr de rien

ça avait à voir avec Macao

et avec des vents qui ne soufflent pas de ce côté-ci du monde


chante danse souque 

on dormira demain matin

 

tesson dans la plante du pied au réveil

écho d'une bonne engueulade

les plaies aiment bien l'ouvrir à tort et à travers

vois sur la table de nuit s'il reste un fond de rhum


il y en a qui appellent ça la vie

d'autre

la guerre

 

mais quand même

à la dernière perm

on s'est bien marrés


09/06/2013

Taper, taper, taper

 

théorie des genres, épopée, tragédie, clément méric, emballements romantiques

 

La vie est d'essence littéraire, y compris ma flemme et ma cirrhose.

Alors, ressers-moi un verre.

Ce que j'ai à dire à ce comptoir a intérêt à dépasser en connerie tout ce qu'on entend depuis quatre jours, sinon, ça ne sert à rien.

S'il-te-plaît, la petite soeur.

Parce que des fois, comme ça, les gens crèvent.

Des fois, comme ça, c'est en pleine rue.

Assassinés par des pots de fleurs, n'en déplaise à une certaine catégorie de collègues à moi. Ou tombés au combat pour un genre littéraire.

Quoi qu'il en soit, il faut des mots.

Des mots pour les cadavres. Conjurations et apaisement des âmes, la peur qu'elles nous tournent autour au-delà du délai prescrit.

Et aussi, résistance aux mots de l'extérieur.

Aux crachats endémiques.


Mais d'abord, perdre cette sale bidoche.

Perdre cette bidoche, c'est le sujet.

Parce que, justement, il est ici question de gens maigres.

De l'intransigeance des maigres.

Je dis MAIGRES. Je continuerait à dire MAIGRES et je n'abaisserai pas à GAMINS, PAUVRES GOSSES ou à parler de tragédie, parce qu'en France, depuis quarante ans, à 19 ans on est à même de faire des choix politiques et d'en assumer les poings américains, et parce que ceux qui crèvent au combat ont mérité leur épopée.

De même que je n'abaisserai pas à dire comme ici ou là -

..........que les gosses avaient succombé à un emballement romantique.......................

..........dérivé d'un désir de militer..............

............ne trouvant pas à s'exprimer dans les partis traditionnels

Je prends n'importe quelle argumentation — sauf le mépris et la malhonnêteté intellectuelle. Et il en faut beaucoup, mépris et mauvaise foi, pour ne pas voir que sans succombateurs à emballements romantiques, il y a longtemps que le monde entier ressemblerait à la Russie à la fin des années 90. Ou au Kosovo aujourd'hui. Ou à la Corée du Nord, les jours de grosse motivation.

Admets-le et ressers-moi l'avant-dernier, s'il-te-plaît, après j'ai de la route.

Il n'y a pas à tortiller question théorie des genres, et pour une fois, tu vas être content d'avoir un petit poète perso pour ton zinc.

Voici mon expertise : une tragédie est une tragédie, et un combat de rue entre deux factions prêtes à finir sur le carreau pour une cause, c'est une épopée.

Alors, envoie le dernier, et sois sympa avec les pleureuses : il n'y a pas de boulot pour elles.

Il n'y a de boulot que pour un poète. Et pour un sculpteur.