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16/11/2023

De la tripe

Maintenant il faut que vous compreniez bien une chose à propos des livres de développement personnel : c’est un genre. Un genre littéraire : rappelez-vous ça. C’est important.

Comme tous les genres littéraires – de même que comme toutes les formes vies traînent un code génétique – les livres de développement personnel ont un ensemble de caractéristiques distinctives : une poétique.

Les livres de développement personnel s’adressent directement à la lectrice au lecteur. Parfois en tutoyant, parfois pas – ça dépend du degré de vernis pseudoscientifique. Dans le cas des Amerloques c’est le choix du traducteur et de l’équipe éditoriale. Mais les livres de développement personnel s’adressent à vous. À toi. Personnellement.

Les livres de développement personnel commencent par un récit. C’est mieux si c’est autobiographique mais c’est le récit qui compte. Le récit doit être simple, concis, orienté vers la résilience : handicap, misère, OK, viols, mauvais traitements, accidents, super, un immense effort de volonté puis cocotiers limousine passages télé.

Nous lecteurs nous lectrices du XXIè siècle, c’est fou ce que nous avons la dalle de vies de saints et d’ouvrages édifiants.

Nous voulons qu’on nous berce. Qu’on nous dorlote. Qu’on nous sussure. Qu’on nous emmène d’un point A à un point B avec toutes les structures narratives que nous connaissons si bien. Nous savons comment ça se terminera mais c’est si bon à la veillée. C’est comme ça que nous comprenons le monde. C’est de ça que nous vivons. C’est comme ça que notre attention, notre bienveillance, sont disponibles pour toutes celles tous ceux qui sauront en faire usage.

Après seulement vient la matraque télescopique des présents de vérité générale.

Deux-trois concepts-clés deux-trois groupes de mots reviennent tout le temps. Comme un refrain. Comme un chant chamanique pour enfourcher la transe. Comme une anaphore dans une performance de poésie, un débat présidentiel.

On peut mettre des exercices pratiques à la fin des chapitres. Faire des résumés « à retenir ». Isoler des bouts de phrases en pleine page police 28 pour bien enfoncer le clou dans matière molle et grise.

Il faut des études scientifiques mais pas de contextualisation. Et puis des citations. Einstein. Teresa. Gandhi. Tous les autres. Et surtout : de l’aplomb. Jamais de doute.

Mais de la tripe. Beaucoup.

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